La Chambre sociale dans un arrêt du 11 décembre 2019[1] (n°19-17.298) est venue préciser les contours du critère de l’autonomie de gestion pour les établissements distincts dans le cadre de la mise en place du CSE.
Ainsi, en l’absence d’accord collectif, la reconnaissance de la qualité d’établissement distinct pour la mise en place du CSE dépend de ce qu’on appelle l’autonomie de gestion dont dispose le responsable de l’établissement. Est entendu par « autonomie de gestion », le fait pour le responsable de détenir le pouvoir de direction en matière de gestion du personnel et sur l’activité de l’établissement notamment.
Dans l’arrêt du 11 décembre, la Cour pose le principe selon lequel « la centralisation de fonctions support et l’existence de procédure de gestion définies au niveau du siège ne sont pas de nature à exclure l’autonomie de gestion des responsables d’établissement. ». La Cour rejoint donc la position du Conseil d’Etat, position prise dans une décision du 3 octobre 1994 (n°111401).
En plus de poser ce principe, la Cour dégage deux éléments permettant de caractériser ladite autonomie de gestion nécessaire à la reconnaissance de l’établissement distinct. Il faut qu’une part, une délégation de pouvoirs dans de nombreux domaines et d’autre part, la conclusion d’accords collectifs au niveau de l’établissement.
En effet, elle énonce dans cet arrêt qu’« ayant constaté l’existence de délégations de pouvoirs dans des domaines de compétences variés et d’accords d’établissement, il appartenait en conséquence de rechercher au regard de l’organisation de l’entreprise en filières et en sites le niveau caractérisant un établissement distinct au regard de l’autonomie de gestion des responsables. ».
Dans un second arrêt cette fois rendu le 19 décembre 2019 (n°18-23.655)[2], la Cour s’est prononcée pour la première fois dans le cadre du CSE sur la détermination des établissements distincts et confirme sa position du 11 décembre.
Dans les faits, il s’agissait de la SNCF et de la Direction a sur le fondement de l’article L. 2313-4 du Code du travail fixé unilatéralement le nombre et le périmètre des établissements distincts. Cette décision a été contestée devant la DIRECCTE mais cette dernière a procédé à un découpage correspondant à celui établi par l’employeur. Les organisations syndicales ont donc contesté ce découpage devant le tribunal d’instance. Le tribunal a à son tour fixé un nombre et périmètre identique à celui retenu par la DIRECCTE.
Ainsi, deux questions étaient posées dans le pourvoi : la compétence du tribunal d’instance et la caractérisation de la notion d’autonomie de gestion. Nous nous concentrerons ici seulement sur cette deuxième question.
Pour comprendre le contexte, il existait avec les anciennes IRP, 31 comités d’établissement, 600 CHSCT et 1 800 délégations du personnel. Pour le CSE, le découpage prévoit 33 comités sociaux et économiques. Les organisations syndicales souhaitaient par leur pourvoir faire rajouter un critère de proximité dans la caractérisation de l’établissement distinct.
Cependant, la Cour continue dans sa logique en reprenant la solution dégagée par le Conseil d’Etat. Ce dernier s’attache uniquement à vérifier les pouvoirs consentis au responsable de l’établissement caractérisés en matière de gestion du personnel et d’exécution du service.
Dès lors, la Cour considère que « le tribunal d’instance a bien recherché les éléments lui permettant de vérifier le critère d’autonomie de gestion ainsi défini, et que les syndicats contestataires n’apportaient aucun élément permettant de considérer qu’il existait, au sein de l’entreprise, d’autres établissements que ceux retenus par la décision de la DIRECCTE répondant à ce critère. ».
On considère donc que comme pour les comités d’entreprise, l’établissement distinct dans la cadre du CSE est caractérisée par l’autonomie de gestion dont dispose le responsable de l’établissement à raison de pouvoirs en matière de gestion du personnel et de la gestion de l’établissement.
[1] https://www.audit-experts.fr/dernieres-mesures-droit-du-travail/
[2] https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/chambre_sociale_576/1883_19_40990.html