Un salarié dénonçant un harcèlement moral peut être licencié pour faute grave

Cass. soc., 7 février 2018, nº 16-19.594

 

 

En matière de harcèlement moral, le régime de la preuve est aménagé. En effet, dans un premier temps, le ou la salarié(e) qui s’estime victime de harcèlement moral doit apporter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Ensuite, dans un second temps, la partie défenderesse devra prouver que les agissements incriminés ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

 

Pour protéger les salariés dénonçant un harcèlement moral, le Code du travail prévoit que la dénonciation des faits de harcèlement moral ne peut constituer un motif de licenciement disciplinaire. En effet, l’article L. 1152-2 du Code du travail prévoit qu’aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié pour avoir témoigné des agissements répétés de harcèlement moral ou les avoir relatés. L’article L. 1152-3 du Code du travail dispose que : « Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ».

 

En l’espèce, une salariée a été licenciée pour faute grave au motif qu’elle avait dénoncé de mauvaise foi des faits de harcèlement moral. La salariée a saisi la juridiction prud’homale  afin de contester son licenciement et afin que les juges prononcent la nullité de son licenciement.

 

La salariée avait produit divers courriers pour étayer ses affirmations relatives au harcèlement moral qu’elle invoquait. Les juges du fond ont relevé que ces divers courriers avaient été écrits par la salariée elle-même. Ils ont donc considéré qu’il n’était pas démontré que la salariée avait été victime de harcèlement moral dans le cadre de son travail et que le licenciement de la salariée n’était pas frappé de nullité. La salariée a donc été déboutée de ses demandes. Elle a contesté la décision des juges du fond devant la Cour de cassation.

 

Cependant, la Haute juridiction a validé la décision de la cour d’appel qui, examinant l’ensemble des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a estimé que la salariée n’établissait pas la matérialité d’éléments de fait précis et concordants permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral.

 

La Haute juridiction a jugé en ces termes :

 

« ayant constaté qu’un simple examen du courrier par la salariée, qui exerçait les fonctions de secrétaire et connaissait donc parfaitement les caractéristiques habituelles du papier à en-tête et les habitudes de pagination, était suffisant pour lui permettre de mettre en doute l’authenticité de ce document et que la salariée a fait usage de ce courrier en toute connaissance de cause, sans prendre la peine d’une vérification par la transmission d’une copie avec demande d’explication à son employeur, utilisant ce document douteux pour étayer les accusations de harcèlement qu’elle adressait à la Direction, la cour d’appel, qui a fait ainsi ressortir la mauvaise foi de la salariée, a pu en déduire que ce fait rendait impossible son maintien dans l’entreprise et était constitutif d’une faute grave ».

 

Conclusion :

 

Ainsi ce qui est à retenir de cet arrêt du 7 février 2018, c’est que le ou la salarié(e) qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié(e) pour ce motif, sauf mauvaise foi.